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APR à Thiès : Une Remobilisation est-elle Encore Pensable ?


Rédigé le Mardi 2 Avril 2024 à 10:18 | Lu 417 fois Rédigé par


Dans le tumulte post-électoral qui a vu l'Alliance Pour la République (APR) vaciller sous les coups de boutoir du Pastef à Thiès, la question de la remobilisation du parti se pose avec acuité. Entre les luttes de pouvoir internes, les défections notables et une campagne électorale entachée de controverses, l'APR de Thiès semble naviguer en eaux troubles. Des figures centrales comme Augustin Tine et Abdou Mbow, malgré leur influence notable, n'ont pas su éviter les écueils de la division, tandis que des initiatives de massification se sont heurtées à des obstacles insurmontables. À cela s'ajoute une gestion des ressources qui a alimenté les dissensions plutôt que de fortifier le parti. Dans ce contexte, l'appel à la remobilisation lancé par certains leaders apparaît comme une gageure, posant la question cruciale : l'APR à Thiès peut-elle réellement se réinventer et retrouver son élan dans une ville où les espoirs de changement ont été largement déçus ?


Au cœur de Thiès, le théâtre politique a offert un spectacle inattendu lors des dernières élections présidentielles : la chute du Benno Bokk Yakaar au profit du Pastef, sous la conduite de Bassirou Diomaye Faye, a secoué les fondations même de l'Alliance Pour la République (APR). Dans cette ville que je couvre en tant que rédacteur en chef depuis deux décennies, jamais le vent du changement n'avait soufflé avec une telle force, mettant à nu les fractures profondes au sein de l'APR. Face à cette débâcle, Abdou Mbow appelle à une remobilisation du parti. Mais est-ce réellement possible ? Thiès, ce bastion politique de longue date, ressemble aujourd'hui à une "armée mexicaine", un rassemblement d'individualités aux ambitions divergentes, souvent en conflit ouvert sur l'échiquier politique.
 

Augustin Tine et Abdou Mbow, respectivement ministre et premier vice Président à l'Assemblée nationale, ont émergé comme des figures de proue de l'Alliance Pour la République (APR), leur proximité avec le Président Macky Sall leur conférant une influence considérable. Toutefois, cette influence a également été source de tensions et de divisions au sein du parti. Si Augustin Tine a initialement bénéficié d'un large soutien dans le département, sa posture jugée intransigeante et ses démêlés avec divers membres de l'APR ont peu à peu altéré cette unanimité.

Des personnalités influentes comme Thierno Alassane Sall, autrefois pilier de l'APR à Thiès, ont fini par quitter le navire, illustrant de manière spectaculaire les fractures internes du parti. Le départ de Thierno Alassane Sall, qui a créé son propre parti, le RV, et l'exclusion de Ndeye Tické Ndiaye Diop, affectée au Brésil en tant qu'ambassadrice, soulignent les conséquences des luttes de pouvoir et des stratégies d'exclusion menées par le duo Tine-Mbow. On se souvient de la lutte acharnée entre ces leaders et le tout-puissant Siré Dia, autrefois entravé dans son désir de massification par ce duo inséparable qui lui menait une guerre sans merci à travers la presse.

Ces événements marquent non seulement une perte de talents et de soutiens cruciaux pour l'APR mais également une incapacité à maintenir une cohésion interne, essentielle à toute ambition de massification du parti à Thiès. L'accès au Président Macky Sall, filtré et contrôlé par Tine et Mbow, a renforcé la perception d'un cercle fermé, exacerbant le sentiment d'exclusion parmi ceux qui souhaitaient contribuer à l'essor de l'APR dans la ville.

Cette dynamique a finalement érodé l'élan du parti à Thiès, où le désir de participation et d'influence directe sur les orientations politiques s'est heurté à un mur d'intransigeance et de contrôle. La situation a reflété une crise plus large au sein de l'APR, où les ambitions personnelles et les alliances stratégiques ont souvent prévalu sur l'intérêt collectif et la vision partagée, questionnant la capacité du parti à se remobiliser et à retrouver une place de choix dans le cœur des Thiessois.
 

La léthargie du Benno Bokk Yakaar à Thiès peut largement être attribuée à une centralisation excessive du pouvoir et à un accès restreint aux cercles décisionnels du parti, symbolisés par la figure de Augustin Tine et Abdou Mbow. Cette dynamique a instauré un système où l'adhésion et la montée en influence au sein de l'APR nécessitaient leur aval, une condition qui a sélectivement favorisé quelques individus, dont Abdoulaye Dièye est l'exemple le plus frappant. Sa proximité avec le duo lui a non seulement permis de gravir les échelons jusqu'à devenir le Directeur Général de l'AIBD mais aussi de tenter, bien que brièvement, de massifier le parti à Thiès, une rare réussite dans un contexte autrement stagnant.

Rien que l'état de la Permanence de l'APR à Thiès est révélateur de la situation plus large du parti dans la ville. Délabré, souvent fermé, il témoigne d'une organisation qui peine à inspirer confiance ou à attirer de nouveaux membres. Ce lieu, censé être un bastion de l'activité politique de l'APR, est devenu le symbole d'un parti en déclin, incapable d'occuper un espace décent ou d'entretenir un lieu vivant de rencontre et d'échange pour ses membres.

Pire encore, la gestion des ressources du parti a exacerbé les divisions internes. Terrains, riz, denrées et fonds de campagne, plutôt que d'être utilisés pour dynamiser les activités politiques et électives, ont été répartis de manière opaque, alimentant les rumeurs et le mécontentement au sein de la communauté. Ce partage inéquitable, loin de renforcer l'unité ou de soutenir la cause commune, a semé la discorde et la jalousie, minant les fondements mêmes de solidarité au sein du parti.

La désorganisation, alimentée par un climat de méfiance et de crainte de réprimande de la part des figures de proue du parti, a plongé l'APR de Thiès dans un cycle destructeur. La complicité de certains, manipulant les leviers de pouvoir pour leur propre gain ou pour nuire à des adversaires politiques, a créé une atmosphère toxique, dissuadant de potentiels nouveaux adhérents et démobilisant les membres existants.

 

Le dernier acte de la saga tumultueuse de l'APR à Thiès s'est joué lors de la campagne d'Amadou Ba, où le spectacle offert fut moins celui d'une unité partisane que d'un théâtre de tricherie et de désillusion. Notre journal, Thiesinfo, a mis en lumière ces agissements à travers la publication d'un article intitulé "Les trompeurs d'Amadou Ba démasqués", révélant la façade de victoire brandie par certains membres de l'APR qui, en réalité, n'avaient guère contribué à la campagne, restant inactifs alors que la bataille pour Thiès battait son plein.

Cette révélation a exacerbé le sentiment de frustration parmi les militants et sympathisants de l'APR, qui ont vu leurs efforts et leur loyauté être sapés par les manœuvres de quelques-uns. Le climat délétère, marqué par la traque et la confrontation, a rendu la vie difficile pour ceux qui, au sein du parti, aspiraient à une véritable compétition électorale et à un engagement sincère pour le succès de leur leader.

Face à ces révélations, l'appel à la remobilisation de l'APR par certaines figures du parti sonne désormais creux, voire ironique, pour de nombreux militants désabusés. Comment envisager une quelconque remobilisation dans un environnement où la confiance est érodée et où les actions passées ont laissé des cicatrices profondes ? La tâche semble d'autant plus herculéenne à un moment où le parti a perdu non seulement son influence mais aussi le pouvoir, transformant l'idée d'une renaissance à Thiès en un rêve lointain, voire impossible.

Cette situation souligne non seulement la nécessité d'une introspection profonde au sein de l'APR mais aussi l'urgence d'une réforme qui pourrait redonner espoir et vigueur à un parti en quête de rédemption. Sans un changement significatif dans la manière de gérer les campagnes et de traiter les militants, parler de remobilisation pourrait bien rester une illusion, éloignant encore plus l'APR de la reconquête de Thiès.



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